Du 14 septembre au 9 Octobre : le travail des députés en assemblée, les journées d’octobre, le peuple à Versailles, le roi et la reine ramenés à Paris
Versailles le 11 septembre 1789
Je n’ai point voulu, ma chère femme retirer le paquet des trois ou quatre mémoires que tu m’as adressé par la poste, je les ai abandonnés au directeur pour le remboursement des seize livres de port qu’il coûtait, cependant après l’avoir décacheté j’ai eu l’adresse de retirer ta lettre. Il
faut que tu sois persuadé que j’ai mes ports francs puisque tu négliges de m’adresser tes lettres et paquets sous le couvert de Monsieur du Terrage ainsi que je te l’avais indiqué. Je t’envoie les deux quittances des aubretiorel, tu y joindras 24 livres ce qui fera 156 livres pour un terme échu au 1er mai dernier de la rente viagère que nous devons à Monsieur Audouin. Tu auras soin d’en retirer quittance. Je pense que Monsieur Girard aura payé le terme du premier novembre dernier, ainsi que je l’en ai avais prié. Je te prie de lui demander, car je ne me rappelle pas qu’il me l’ait marqué. Tu me diras si ton Falour est resté, ou si tu as suivi ton projet de le renvoyer.
Par quel hasard étais-tu invité à dîner chez le curé de Saint-Germain ? Tu ne me donnes point des nouvelles de nos connaissances des environs de Montfaucon, je les apprendrais cependant avec plaisir. Hier l’assemblée a décidé que l’Assemblée nationale serait permanente,
c’est-à-dire que chaque année elle s’assemblerait trois ou quatre mois sans nouvelle convocation, les députés resteront chargés de leur pouvoir une ou deux années (le temps n’est pas encore fixé) et après le temps, les provinces s’assembleront pour nommer de nouveaux députés. Aujourd’hui notre séance a commencé à neuf heures matin et a continué sans interruption jusqu’après huit heures du soir, il n’a même pas été permis de s’en aller dîner, nous avons arrêté un des articles les plus importants de notre constitution. Savoir « le consentement du roi est nécessaire pour la promulgation et l’exécution des actes du corps législatif ; lequel consentement il pourra suspendre jusqu’à une ou deux nouvelles sessions de ‘assemblée…….. le temps sera déterminé demain. Les ennemis de notre liberté ont fait ce qu’ils ont pu pour accorder au roi un veto ou le droit absolu de refuser à son gré les lois qui lui seraient présentées par l’Assemblée nationale ; cependant à la majorité de 673 voix contre 339 le veto suspensif seulement c’est-à-dire, le droit de suspendre pendant un temps limité l’exécution des lois a été prononcé. S’il en eût été autrement, le roi serait devenu despote plus que jamais. Monsieur Gallot part la semaine prochaine à cause de la maladie de M. son père. Je serai seul, et je m’ennuierai bien si tu ne viens pas me rejoindre. J’ai reçu 930 livres pour mon voyage et les frais de séjour jusqu’au 1er juin il m’est encore dû trois mois et le courant. Dans huit jours j’en recevrai un autre. Je ne peux écrire à ton fils, embrasse-le pour moi, dis-lui que je suis content, que je lui donne un petit écu, que tu lui donneras au reçu de ma lettre embrasses-le pour moi et Mariette.
Mes compliments, honnêtetés, respects à nos connaissances et principalement à Monsieur Girard et au prieur de Roussay
Adieu ma bonne amie
Versailles le 14 septembre 1789
Nous ne quitterons pas, ma bonne amie la ville de Versailles que notre opération ne soit finie, et je vois avec peine que je serais forcé d’y passer une partie de l’hiver, ce qui me contrarie infiniment. Être toujours éloigné de toi, et de nos amis est une grande privation, le traitement
avantageux que l’on nous a fait ne me dédommage aucunement. Tu es étonné de ne point voir mon nom parmi ceux qui portent la parole dans l’assemblée, mais si tu as bien fait attention tu n’auras vu que les mêmes, nous avons environ 50 à 60 personnes qui ont les poumons assez forts pour se faire entendre dans toutes les parties d’une salle immense, et les parleurs ne écitent pas toujours leur travail, mais souvent le travail des autres ; j’ai parlé quelquefois, mais je n’étais entendu que des personnes qui m’approchaient, malgré que j’employasse toutes mes forces. Et quoi que je ne parle pas souvent, et que je me contente d’écrire, et de donner succinctement mon avis, cependant j’ai lieu de me louer des égards de l’assemblée, j’ai été
nommé deux fois secrétaire de mon bureau, et élu le cinquième d’un des comités les plus importants celui de judicature. Il a été formé un autre comité depuis pour le commerce et l’agriculture composée de 64 membres, néanmoins il y a encore que 214 personnes sur les 12 cent qui soient commissaires. Au surplus mon seul désir est de coopérer au bien public, je ne déserte serai jamais la bonne cause, je suis moins jaloux de paraître avoir fait une motion souvent absurde, que d’avoir donné un bon avis. Nous avons malheureusement parmi nous plusieurs membres qui ont oublié leurs missions, et qui se sont laissé séduire par le clergé et les nobles, nous serions certainement vaincus, si nous n’avions environ 40 ecclésiastiques dans notre parti, et à peu près 100 nobles.
Les privilèges sont abolis, mais les préjugés de la noblesse subsistent encore, nous sommes continuellement en opposition, et cette contradiction habituelle joint à une défiance réciproque, retarde considérablement nos opérations. Heureux ceux qui nous succéderont dans la prochaine session nous avons déclaré ce matin que les membres de l’assemblée seraient renouvelés tous les deux ans, mais cependant que nous ne resterions qu’une année revêtus de notre pouvoir, et aussitôt que nous aurons réglé la constitution nous nous retirerons, et nous ferons place à ceux qui nous succéderont.
Tu m’étonnes en me disant que Madame des Melliers n’a pas reçu ma réponse. Sa lettre du 10 me parvint le 15. J’y répondis le même jour, et je lui adressais à Nantes rue Saint Denis près Notre-Dame ainsi qu’elle me l’indiquait. Je lui marquais que Tiron étais près Nogent le Rotrou à 8 lieues au-dessous de Chartres. Lorsque que tu verras le prieur de Roussai tu lui diras que j’ai reçu sa dernière lettre, qu’il a dû en recevoir une par le dernier courrier de ma part, que je lui répondrai incessamment. Lorsque tu verras Monsieur Girard dis-lui que l’adresse de Montfaucon a été lue à l’Assemblée nationale le 28 du mois dernier et que mention en a été faite dans le procès-verbal de ce jour. Je t’ai écrit de donner 3 livres à ton fils, mai donne que 24 sols. J’aurais bien voulu leur écrire, mais je n’en ai pas le temps ; embrasse-les tous les deux pour moi. Je t’envoie sept quittances pour rentes de blé. Les rentes sur la Messandière, la Cerclaye, et la Groslière sont requérables, les autres sont rendables et on les amène ordinairement la veille ou le matin de la Saint-Maurice, tu prendras une note de celle que tu recevras, je n’ai pu faire les autres quittances. Le 20e qu’il faudra payer est marqué à côté de chaque quittance. Celui de Maissandiere est taxé sur les rôles, il faut le faire payer et retirer quittance. Embrasse ma sœur, respects honnêtetés et compliments à toutes nos connaissances. Donne-moi donc des nouvelles du Chevalier des Melliers.
Porte-toi bien ma chère femme Lofficial
Versailles le 18 septembre 1789
Je reçois une lettre de Monsieur Duplessis, ma chère femme qui m’annonce que mon fils lui a écrit, et qu’il lui marque que tu as mal à la tête, ce qui me fait craindre que tu n’aye éprouvé les accidents ordinaires, je suis d’autant plus fondé à le craindre, que je n’ai point reçu de lettre de toi par le courrier de Montfaucon, j’espère en recevoir demain qui me tranquillisera. Nous tremblons pour le sort du royaume, les évêques et des grands seigneurs se sont ligués ensemble pour arrêter toutes les opérations de l’assemblée, et tromper le roi; pour détourner les malheurs qui menacent ce beau royaume notre meilleur parti est de faire assembler de nouveaux les bailliages pour nommer d’autres députés suivant le nouveau système, c’est-à-dire sans avoir égard aux distinctions d’ordre, de sorte que les bailliages pourront nommer des députés, ou tous prêtres ou tous nobles ou tous roturiers, et nous avons lieu de croire peu des nobles et des prêtres qui sont actuellement à notre assemblée seront réélus, ou plutôt on se donnera de garde de nommer des blasons et des mitres, qui sont la cause de tous nos malheurs. La proposition en a été faite ce jour à l’assemblée, et aux applaudissements qu’elle a reçus, nous présumons que demain elle sera accueillie. Ce qui a motivé cette proposition, est l’explication ou les observations que le roi a donné aux arrêtés du 4 aout, dans les quelles nous avons remarqué principalement le génie des évêques. Nous demandions que le roi ordonna la promulgation légale de nos arrêtés du 4 août seul moyen de rétablir la tranquillité dans le royaume,et le roi par ses observations veut les livrer à une nouvelle discussion, ce qui est contraire à l’esprit de l’assemblée. Enfin il paraît inévitable que la division qui règne dans le royaume occasionnera une guerre civile, et dans la disposition actuelle des esprits, nous n’y voyons guère de remèdes, nous en devrons l’obligation aux nobles et aux évêques trop aveugles pour voir que les premiers coups seront frappés sur leurs têtes. Je pense que tu verras Monsieur Duplessis, et peut-être sera-t-il avec toi lorsque ma lettre te parviendra, embrasse le pour moi, tu lui diras que j’ai reçu celle qu’il m’a écrit, que je lui répondrai incessamment, mais que M. Dupouet et M. de Fontaine ne m’ont point parlé de ce qui s’est passé à l’assemblée du 8 dont il m’instruit. Si tu as beaucoup de poires je pense que tu n’oublieras pas d’en faire sécher, les poires de Saint-Michel et de Beuré valent mieux. Donne-moi des nouvelles de la foire, embrasse tes enfants, mes amitiés à ma sœur rappelle-moi au souvenir de nos connaissances.
Porte-toi bien ma chère femme. Lorsque tu renverras Falour il faudra t’envoyer 10 louis à Monsieur Dupouet pour payer le bois, et une charge et demie de méture que Falour ira acheter chez M. de Saint-Sulpice comme l’an dernier. Ils en mettront un boisseau sur deux de seigle.
Versailles le 21 septembre 1789
J’avais appris, ma chère femme, la mort de M. des Fossés que je regrette infiniment ; j’ai écrit à Madame des Fossés pour la complimenter. Tu me dis que ta santé est bonne, cependant j’ai su par M. Duplessis que tu avais été incommodée. Cette réticence me fait craindre que tu sois encore malade et que tu ne me déguise la vérité. Les lettres que tu m’envoie par Cholet ne sont jamais mises à la poste le samedi, elles ne partent que le mardi suivant, et je les reçois 10 jours après. Le 11 tu me marque que ton fils est à son second accès de fièvre : cette fièvre n’a-t-elle point un mauvais caractère !? Les fièvres qui prennent dans ce temps-ci sont ordinairement de longue durée ; ne laisse passer aucun courrier sans m’en donner des nouvelles. Je n’ai jamais douté que tu prendrais grand soin de lui, mais pour ma tranquillité je serai bien aise de connaître sa situation. Je lui écris à ma manière c’est-à-dire en lui parlant toujours le langage de la raison et de la vérité, on ne peut trop tôt l’employer vis-à-vis les enfants. Je donne une petite semonce à Mariette, seconde-moi à la corriger en recevant avec amitié ses excuses. C’est le moyen de te l’attacher, nous sommes ici pour une partie de l’hiver et peut-être pour l’hiver entier : je m’en inquiète déjà, et je crains de tomber malade surtout que Monsieur Gallot persiste dans son projet de se retirer dans le mois prochain. Huit heures de séance dans un endroit qui sera échauffé par les poêles, doit nécessairement occasionner coup de maladie par le passage du chaud au froid. Peut-être que l’amour du bien public nous préservera. Tu me dis que le blé à Montigné vos 52 sols le boisseau et qu’à la Châtaigneraie il en vaut cent sous, certainement il est meilleur marché dans ce dernier endroit. Le boisseau de la Châtaigneraie est un peu double de Montigné, s’il valait 5 livres 6 sols à la Châtaigneraie, ce serait égalité de prix à peu près. Vend les rentes de la Messanderie, de la Cerclaye et la Groslière qui sont requérables, et tu feras acheter du blé à la Châtaigneraie, je crains qu’il n’augmente encore et qu’il devienne
extrêmement rare, ainsi il sera bon d’en garder une partie vers Pâques. M. Béranger m’avait demandé à affermer ma pièce de terre pour le pacage, mais comme mon projet est de la faire labourer l’année prochaine, je ne pourrais lui affermer que jusqu’à la mi-avril, ce qui peut-être ne l’accommoderait pas. Lorsque tu renverras Falour à la Châtaigneraie, fait lui porter 300 livres pour Monsieur Dupouet au lieu de 240 livres que je t’avais dit précédemment ; il en donnera 121 livres pour le loyer de notre maison qui écherra à la Saint-Michel prochaine, et 48 livres à Bruron à valoir sur la pension de Radegonde. Mes amitiés à ma sœur, mention de moi auprès de toutes nos connaissances. Donne-moi des nouvelles de Falour.
Bas de page : en chiffres petit calcul 121 +48 = 169
Versailles le 25 septembre 1789
Je t’ai écrit, ma bonne amie, que nous étions tranquilles autant que nous pouvions l’être, et je t’ai dit la vérité. Si nos séances sont souvent orageuses, nous n’en sommes pas moins en sûreté, les contestations et les débats qui s’élèvent lors de nos discussions proviennent des intérêts opposés des différents membres qui composent cette assemblée, qui oublient parfois qui sont les représentants de la nation, pour se rappeler que naguère ils avaient des privilèges fort avantageux pour eux mais très onéreux au peuple. Madame des Melliers a voulu s’amuser, ou l’on a voulu s’amuser, lorsqu’on lui a dit et qu’elle t’a dit, quand voyageant avec la femme d’un député, elle ne serait pas en sûreté
Elle aurait dû tourner la phrase, et dire quand voyageant avec la femme d’un député, elle serait plus en sûreté quand voyageant sans elle, parce que si tu t’étais décidé à venir, je t’aurais adressé un passeport scellé du sceau de l’assemblée, dont tu te serais munie et qui t ‘aurait mieux servi que dix hommes de garde.
Les bruits qu’on a répandus à Montfaucon, et dont le prieur de Roussay t’a entretenu sont dénués de tout fondement. Les habitants de toutes les villes et bourgs de la France, ont toujours le plus grand respect pour les députés des communes, ils savent tout ce qu’ils font pour procurer le bonheur de tous, et combien ils ont à combattre pour faire le bien, et faire porter une bonne loi. Cette vénération je crois n’est pas la même pour tous les députés, il en ait plusieurs parmi la noblesse et le clergé dont les noms devenus malheureusement trop fameux les exposerait aux plus grands dangers s’ils voyageaient. Mais l’estime publique pour nous est telle que lorsque quelqu’un des nôtre est obligé de voyager, lorsqu’on sait qu’il est un député, les principaux habitants se disputent l’honneur de le recevoir et de le fêter.
Mal à propos le prieur de Roussay reproche aux députés de faire des phrases. Jamais discussion ne peut-être plus sèche et que la nôtre. Tout mouvement oratoire est interdit, on expose son avis tout nu, et on permet à peine de courtes réflexions. Il n’est point au courant lorsqu’il dit que nous n’avons rien fait, ses semblables et les nobles trouvent que nous avons trop faits, je me propose de faire le résumé des lois décrétées et l’on verra que notre constitution est fort avancée ; quelle serait finie il y a longtemps, sans les contestations qui nous ont agité pendant deux mois pour amener la noblesse et le clergé à siéger parmi nous, et sans les troubles qui ont agités Paris et toute la France, ce qui nous a emporté beaucoup de temps. J’avouerai cependant qu’on a reproché avec justice à nos orateurs de trop s’appliquer à faire d’éloquents discours, et d’être plus jaloux de montrer de l’esprit, que d’accélérer les décisions, mais il y a plus de deux mois que cet abus n’existe plus, les réclamations réitérées l’ont fait proscrire à jamais.
Le roi et la reine ont envoyé mardi dernier leur vaisselle à la monnaie, l’assemblée instruite de la résolution du roi, arrêta que son président se transporterait aussitôt chez le roi, pour le prier de conserver sa vaisselle, que la nation trouverait d’autres moyens de faire face aux besoins urgents de l’État. Le roi a répondu que la disette du numéraire l’avait déterminé à prendre cette résolution, et qu’il y persistait, et chargea le président de témoigner à l’assemblée sa sensibilité. Les ministres ont suivi l’exemple de leur majesté. Monsieur le duc de Charost, seigneur d’Ancenis fit hier à l’assemblée l’offre de verser dans la caisse patriotique 100 mille livres pour subvenir aux besoins de l’État, dont une partie serait payée par lui en vaisselle pour augmenter le numéraire ; il déclara de plus faire remise à ses vassaux d’Ancenis de l’indemnité qui lui devait la suppression des droits féodaux casuels.
Chaque jour nous recevons des offres patriotiques, celles reçues montent à près de 600 mille livres, et environ 60 mille livres d’abandon de rente ou pension. Dans différentes villes on a ouvert des souscriptions où tous les citoyens ont porté à l’envie leurs offrandes sur l’autel de la patrie, jamais l’État n’a été plus près de sa ruine, mais aussi jamais le patriotisme ne s’est tant manifesté. Nous avons ouvert un registre où nous inscrivons les noms et les offrandes des généreux et bons patriotes, et nous les rendons publique par la voie de l’impression. Puissent ces louables exemples enflammer le zèle de tous les Français jusqu’aux habitants du dernier village !
Monsieur Necker vint hier nous faire un tableau effrayant de la situation des finances. Il ne reste pour le premier 8bre (octobre) prochain dans le trésor public que 3 millions [pour le 1er 8bre] et les dépenses absolument nécessaires de ce mois montent à 33 millions. Et celle des deux derniers mois de l’année à 70 ou 80 millions. L’emprunt ouvert ne va pas, le recouvrement est presque nul, et les circonstances impérieuses ont forcé de diminuer le sel de gabelle de plus de moitié, c’est-à-dire de le réduire à 30 livres le minot au lieu de 64 livres qu’il était payé ci devant dans les pays de grande gabelle, ou six 6 sols la livre au lieu de 14 ou 15 sols. Cette diminution occasionne une perte annuelle pour le trésor royal de 24 millions, on pourra gagner cette somme par les bonifications auxquels nous somme occupé, mais il n’en restera pas moins un déficit de 61 millions et nous ne voyons pas trop comment le remplir. M. Necker propose de mettre une contribution passagère du quart du revenu sur tous les biens fond du royaume et de 1 ou 2 pour cent sur les capitalistes, et sur toutes les fortunes mobilières. Tous les contribuables seront cru à leur déclaration, mais il répugne d’exiger le serment, dans un moment où tous les citoyens s’empresseront à l’envi de venir au secours de l’État, tous les propriétaires feront leur déclaration suivant cette formule, je déclare avec vérité. Monsieur Necker propose en outre d’établir dans toutes les villes et bourgs du royaume d’établir une caisse patriotique où tous les citoyens sans distinction offrira son don, ils pourront même recevoir s’ils l’exigent 4 pour cent de ce qu’ils porteront à la caisse ; la villageoise, dit Monsieur Necker, pourra apporter son anneau et sa croix. Voilà ce que j’ai retenu de la lecture du mémoire de Monsieur Necker qui puisse avoir lieu ici. Nous avons renvoyé à un comité l’examen du mémoire de M. Necker et des moyens qu’il propose, demain nous nous occuperons de la discussion. Quant au décret de la gabelle, il fut présenté hier à la sanction royale, et les provinces le recevront incessamment, ce sera une grande diminution pour les impositions de Montfaucon et Saint-Macaire
Varation de la Gabelle de 1 à 60 soldes
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Il a été décrété aujourd’hui que tous les nobles et privilégiés seraient imposés pour les six derniers mois de l’année sur un rôle additionnel, de la même manière et dans la même forme que les autres contribuables, et que le produit de ce rôle tournerait au profit des malheureux et autres redevables, soit en en destinant une partie pour des travaux de charité, soit en mettant un moins imposé sur l’année 1790. Je crois que le marquis d’Asnière et les Mallet ne seront pas contents, mais c’est justice. Le rôle de l’année prochaine se fera sur tous les citoyens de toutes les classes sans distinction de qualité et de fonction, à proportion de leurs exploitations et de leurs facultés de même que les autres contribuables.
Donne-moi des nouvelles de ton fils. Tu as oublié de répondre à la demande que je t’avais fait il y a longtemps, lorsque tu m’écrivis que tu avais reçu soixante et quelques livres de M. Dajouit le Royal, je te demandais pourquoi il t’avait donné cette somme. J’aurais été bien aise de le savoir. Tu ne m’as point dit non plus si ton fils avait appris à jouer du violon et à danser, je lui avais demandé à lui-même, il ne m’a point répondu à ce sujet. As-tu payé ce qui devait être à sa sortie du collège ? Amitiés à ma sœur respects et honnêtetés à nos connaissances.
Je t’embrasse ma chère femme Lofficial
Versailles 9 Octobre 1789
Je t’envoie ma bonne amie un bulletin des choses extraordinaires et inconcevables qui viennent de s’opérer lundi et mardi dernier. La cabale des ennemis de la liberté et du bonheur des Français agissait depuis longtemps en silence pour préparer la révolution qui vient de s’opérer ; heureusement elle est tournée contre eux même, et la cabale est tellement abattue qu’il n’est plus possible qu’elle puisse se relever.
Les prêtres dont la conduite indigne est connue et plusieurs nobles plus attentifs à leur intérêt qu’au bien de l’État, craignant d’être livré à la fureur du peuple, décampent. Mais les il a été arrêté aujourd’hui que le président ne leur délivrerait plus de certificats et que lors que des raisons puissantes les forceraient à se retirer ils en feront part à l’assemblée ! J’ai écrit à madame des Fossés le 19 du mois dernier, je lui répondrai incessamment sur les questions qu’elle propose. Je t’ai écrit il y a huit jours à Cholet où je croyais que tu étais.Je crois ma chère femme tu n’aurais pas dû te presser à vendre la totalité de ton blé, il aurait été prudent d’en retenir une partie. N’égare pas le bulletin que je t’envoie je n’ai pas eu le temps de le porter sur mon journal, et il est probable que je ne puisse le faire. Comme je suis un peu enrhumé, je n’allais point hier à la séance du soir et je profitai de l’instant pour le faire.Communique-le à Monsieur Gérard, à Monsieur Marc et a ton frère. Le roi est à Paris. L’assemblée s’y rendra incessamment, j’ignore où je logerai, ce sera le plus près possible de l’assemblée. Ecris moi sous la double enveloppe de Monsieur le président de l’Assemblée nationale. Lorsque que je serais à Paris je ferai l’emplette de ‘l’amvisier ‘que tu demandes.
Adieu ma chère femme, je t’embrasse bien tendrement. As-tu fait payer le froment de St Gesles la ferme de Bourg Hardy ? Il ne faut point laissez arriérer ses objets.
1 Bulletin joint à la lettre
Lundi 5 8.bre (octobre) 1789. Le Roi envoya à l’assemblée sa réponse aux articles constitutionnels, et à la déclaration des droits de l’homme qui lui avait été présentés la semaine précédente à son acceptation. Ces articles n’étaient pas susceptibles d’éprouver un refus de la part du Roi, parce que le droit de veto accordée sus pensivement au monarque, ne peut frapper que les actes de législation et non point ceux de la constitution qui règle et limite les différents pouvoirs, parce qu’enfin tout peuple qui est assemblé pour établir sa constitution est son juge suprême, et celui qui par cette même constitution reçoit la plénitude de es pouvoirs n’ayant qu’un pouvoir constitué, ne peut s’élever contre le pouvoir constituant. Aussi le roi par sa réponse accorda-t-il son accession à ces articles de la constitution mais [3 mots surchargés] le roi y disait « dans la confiance que ces premiers articles constitutionnels que vous m’avez fait présenter mis à la suite de Notre travail rempliront le veu de mes peuples et assureront e bonheur et la prospérité du royaume. Cette phrase annonçait que le roi n’acceptait la constitution qu’autant que les peuples l’approuveraient [mot rayé] et que le roi ne s’y soumettrait qu’après leur veu itérativement exprimé. Il n’y a pas de doute que si la France est mécontente de cette constitution, elle peut la changer. Mais le roi qui ne gouverne que par elle n’en peut suspendre les effets sur des prétentions éventuelles. Dans un lieu de sa réponse, le roi disait, « que ces articles ne lui présentaient pas tous également l’idée de la perfection » mais je crois ajoutait-t-il « qu’il est louable en moi de ne pas différer d’avoir égard aux veux présent des députés de la nation et aux circonstances alarmantes qui nous invitent si fortement à vouloir par-dessus tout le prompt rétablissement de la paix, de l’ordre de la confiance ». On pouvait croire d’après cela que le roi ne cédait aux circonstances, et que dans un temps plus heureux, il pourrait se refuser à l’observation de la constitution. Ces réflexions occasionnèrent de vifs débats qui furent prolongés depuis neuf heures jusqu’à six heures du soir, et l’assemblée arrêta que son président retournerait devers le roi le supplier d’accepter purement et simplement les articles de la constitution et la déclaration des droits de l’homme.
Le roi déclara le même jour faire cette acceptation pure et simple. Tandis que nous délibérions, Paris était dans la plus grande agitation occasionnée par le défaut de pain. Les ennemis du bien public étaient parvenus à affamer Paris, et la disette la plus grande s’y faisait sentir. Non seulement on empêchait le blé d’arriver à Paris mais on donnait de l’argent aux meuniers pour ne pas moudre et aux boulangers pour ne pas cuire ; le but était d’exciter les parisiens contre l’Assemblée nationale, en lui imputant les causes de la famine qui se faisait sentir dans la capitale, et par là faire séparer l’assemblée, la dissoudre même, en faisant déclarer par les parisiens qu’il ne reconnaissaient point d »autre autorité légitime que celle du Roi, et qu’ils étaient content du régime ancien. On avait pris des précautions pour assurer l’exécution de cet infâme projet, qui aurait plongé les Français dans la servitude, plus profondément qu’auparavant. Les officiers des dragons, ceux du régiment de Flandres qui sont à Versailles, les gardes du corps, se donnèrent jeudi 1er 8bre (octobre) un grand repas dans la salle de l’opéra de Versailles, le[comte] duc de Guiche gendre de Madame de Polignac, d’après les conseils de la bourse de la reine dit-on, en faisait tous les frais. Les soldats et dragons furent invités à cette orgie, le roi et la reine s’y rendirent lorsqu’ils étaient au dessert, je passe le détail affligeant de tout ce qui se passa même en présence du roi et de la reine, je dirais seulement qu’on n’y but à la santé du roi et de la reine, et de Monsieur le comte d’Artois, et que l’on criait, au diable l’Assemblée nationale, dès l’instant on quitta [l’assemblé] la cocarde nationale, on la foula au pied, et le projet de nous égorger fut encore nouvellement conçu. Le samedi suivant cette orgie recommença chez les gardes du roi, et on [mot rayé] proposa de venir à l’assemblée le sabre nu et le pistolet au poing, nous forcer à crier vive le comte d’Artois, et de boire à sa santé ; les faits ont été dénoncés à l’assemblée [en marge lundi der] avec offre d’en faire la preuve. On doutait si peu du succès que les prêtres et les nobles de l’assemblée prenaient déjà la cocarde blanche ou noire, les prêtres avaient un bandeau blanc dans la poche qu’ils faisaient voir lorsqu’ils rencontraient des nobles ou des officiers. C’était le mot de ralliement que les ennemis de la liberté avaient adopté. Le Parlement de Paris et toute l’armée qui y est attachée se répandaient dans les différents quartiers de Paris, augmentaient les maux, et en accusaient l’Assemblée nationale. Il se plaignaient de tous ses décrets, et prêchaient que l’ancien état était mille fois préférable au nouvel ordre des choses que l’assemblée voulait établir. Jamais orage plus violent n’a menacé l’assemblée ; la plupart des districts de Paris corrompus ou séduits par nos ennemis se déclaraient contre l’assemblée ; mais l’ange tutélaire qui veille sur la France a dérangé leurs projets, et a fait tourner contre la révolution qu’ils avaient fomenté et qui vient d’éclater. Sur les cinq heures du soir lundi 5 8bre environ six mille femmes de la populace de Paris arrivèrent à Versailles, nous étions encore assemblés, une cinquantaine d’entre elles furent députées vers nous, et demandèrent à être introduites à l’assemblée. Elles furent admises, elles avaient à leur tête un orateur qui exposa rapidement les malheurs qui affligeaient la capitale, l’affreuse disette qui y régnait ; les précautions prises par les méchants pour occasionner la famine, et porter les habitants de cette immense cité au désespoir. Enfin elles demandaient du pain qui leur manquait à Paris depuis 24 heures. Elles demandaient aussi la punition et la recherche des coupables. Pendant qu’elles haranguaient, une troupe de six ou sept milles parisiens armés envoyés comme avant-garde moins pour réclamer du pain, que pour se venger des gardes du corps qui les avaient insultés en foulant aux pieds la cocarde nationale, se rendaient au château ; les gardes du corps, les dragons et le régiment de Flandres était sous les armes en ordre de bataille. Les parisiens qui avaient résolu de combattre les gardes du corps se présentèrent devant cet escadron. Le combat s’engagea il y eut quelques coups de fusil lâché de part et d’autre, mais le signal du combat fut un coup de sabre donné par un garde du corps a un soldat de la milice parisienne qui était alors sans armes. La sentinelle de la milice de Versailles, indignée de cette lâcheté de son poste lâcha un coup de fusil aux gardes du corps qui lui cassa le bras près l’épaule, d’autres coups de fusil partirent qui tuèrent le cheval du garde du roi. Un autre garde par un carreau de la fenêtre d’un des appartements tu as un officier de la garde parisienne, aussitôt plusieurs coups de fusil partirent et le garde du roi fut tué dans l’appartement même. Six mille hommes de nouvelles troupes de Paris arrivèrent sur les sept heures du soir avec dix pièces de canon. Pour lors une grande partie ( L) des gardes du roi lâchèrent pied, ils fuirent à toutes jambes au travers de la plaine, j’ai envie passer un fuyant à cheval et nue tête. À huit heures du soir arriva encore un nouveau renfort de six à huit mille hommes de troupes parisiennes. avant minuit à onze heures du soir le gros de la troupe arriva avec quinze pièces de canon. On annonçait que leur projet était d’enlever le roi pour le forcer d’habiter Paris ; et de massacrer la reine Nous avions levé la séance à dix onze heures du soir, ayant restés assemblés sans interruption depuis neuf heures du matin. À minuit le roi fit battre la caisse dans toutes les rues pour engager des députés à se rendre à l’assemblée, nous nous y rendîmes aussitôt : projet était de se jeter dans le sein de l’Assemblée Nationale comme il avait fait dans un temps moins critique, le 15 juillet dernier. Mais déjà les gardes qui défendaient les portes avaient été forcées, les portes enfoncées, quelques gardes du corps furent massacrées à la porte de la reine, et la reine n’eut que le temps de se sauver en chemise chez le roi, un moment plus tard elle eut probablement été égorgée dans son lit, tant le peuple était irrité, et tant était grand son acharnement.
On respecta cependant l’appartement du Roi, mais Sa Majesté entendait le tumulte des combattants, et les cris des mourants, quel spectacle cruel pour un roi, de voir son palais violé par ses propres sujets, et ses officiers mourir en le servant ! Quelle affreuse nuit pour leurs majestés ! La reine fondait en larmes et le roi ne pouvait retenir ses sanglots. À six heures du matin mardi, il arriva de nouvelles troupes au nombre de sept à huit mille. J’observe que le château fut investi et que le surplus des troupes se retira dans l’église de Saint-Louis où elles passèrent la nuit # (en marge les parisiens eurent soin d’établir des officiers de la milice pour la garde du roi.) Alors ils avaient fait prisonnier sept gardes du roi, et dès le matin ils les envoyèrent à Paris, où une mort cruelle les attendait. À six heures et demie du matin les troupes se rendirent au château, sous les armes et avec des canons, une autre partie se transporta à l’hôtel des gardes du roi, força les portes, prit les chevaux, et fit prisonnier tous les gardes du roi qui ‘y trouvèrent. La populace fit prisonnier tous les gardes du roi qui s’y trouvèrent. La populace après avoir coupé la tête de deux gardes du roi les mirent au bout des piques, et les portèrent sous les fenêtres du roi, où toute la milice de Paris était demandant à grands cris que le roi se rendit à Paris. Le roi paru sur le balcon de la chambre, demanda aux parisiens ses sujets la grâce de ses gardes déjà envoyés à Paris, et de ceux qu’ils tenaient prisonnier, tous destinés à la mort. Monsieur le ministre de la Fayette commandant les troupes parisiennes, obtint d’elle ce que le roi leur demandait, mais à une condition que rendu à Paris ils [rend] demanderaient pardon aux parisiens. Le roi leur promit qu’il se rendrait à Paris dans le jour avec la reine. L’assemblée nationale arrêta sur les neuf heures du matin que pendant la présente session elle était inséparable du roi. Une députation fut chargée d’aller porter cette décision à Sa Majesté. Quel spectacle déchirant pour les représentants de la nation fidèles à leur roi de voir toutes les cours et tous les appartements de leur auguste chef remplis de gens armés, et leur roi[laissé] livré à leur discrétion ! Nous aperçûmes la reine et ses enfants les larmes aux yeux, dans l’embrasure d’une porte de cabinet et les dames de France toute dans un état faisait verser des larmes aux spectateurs, et le roi dans son cabinet le plus reculé, les yeux rouges, l’expression du chagrin le plus cuisant sur sa figure nous fit éprouver à tous un sentiment bien douloureux. Ses ministres l’accompagnaient. Le roi nous répondit qu’il recevait avec une vive sensibilité les nouveaux témoignages de l’attachement de l’Assemblée nationale, le vœu de mon cœur, a-t-il ajouté est vous le savez, de ne jamais me séparer d’elle : je vais me rendre à Paris avec la reine et mes enfants ; et je donnerai tous les ordres nécessaires pour que l’Assemblée nationale puisse s’y continuer ses travaux. L’assemblée nomma aussitôt une députation pour accompagner le roi à Paris. Les troupes parisiennes défilèrent emportant avec elle plusieurs chariots de pain, et portant à leur tête celles des deux gardes du corps sur de hautes piques. Au milieu de la troupe était les gardes du roi prisonniers, conduits à pied et désarmés entre deux soldats de la garde de Paris. Ensuite venait une cavalerie nombreuse augmentée encore par ceux de la milice de Paris qui s’étaient emparé des chevaux des gardes du corps. Le roi était avec la reine et leurs deux enfants dans la même voiture, venait ensuite Monsieur, Madame, Mesdames de France, les seigneurs de la cour ; et les députés. Leurs majestés traversèrent de Versailles à Paris au milieu d’un peuple immense ; les femmes qui étaient venues à Versailles, insultèrent presque continuellement la reine jusqu’à Paris, il menaçait de l’attacher à réverbère en arrivant, lui imputaient tous les malheurs qui depuis quelques années ont désolé la France, enfin ils osaient la traiter plus ignominieusement que la dernière fille de Paris. La reine poussait de hauts cris, serrait le roi, qui pour cacher ses larmes se couvrait la figure de son mouchoir. En marge nota les ecclésiastiques de la députation furent insultés plusieurs fois dans la route, la conduite indigne qu’ils ont tenu dans l’assemblée leurs a mérité ce traitement. Arrivé à Paris leurs majestés se rendirent à l’hôtel de ville où ils furent complimentés, et dédommagés autant que possible par les gens honnêtes qui s’y trouvèrent, des insultes qu’ils avaient reçues de la populace ; ils se rendirent revinrent ensuite Tuileries où ils font leur résidence. On assure que lors que la reine descendit de l’hôtel de ville, une femme lui dit « ma belle dame à tout péché miséricorde, on vous pardonne pour cette fois mais n’y revenez pas. » Voilà donc le roi prisonnier de ses sujets, à la discrétion des parisiens ! Quelle situation critique, que d’angoisses le roi n’a-t-il pas du éprouver pendant ces deux jours ! Quelle terrible leçon pour les autres monarques de l’Europe ! J’ai oublié une circonstance intéressante le roi et la famille royale la Reine voyant le danger qui les menaçait, prirent le lundi soir la résolution de se rendre à Rambouillet, où il y a beaucoup de troupes, quatre voitures vides avec déjà été envoyé en avant mais elles furent arrêtées par la milice, et d’ailleurs toutes les issues du château étaient investies. Nota en marge le projet en excitant cette révolution, était comme je l’ai observé d’amener le peuple contre l’assemblée, et de faire partir le roi pour Metz, le Mis. De Bouillé venant avec 30 mille hommes décidés à reconquérir ce que l’autorité des politiques avait perdu. Et à asservir le peuple plus fortement qu’auparavant. La vie de la reine était exposée, les femmes qui s’étaient rendues au château demandaient sa tête à grands cris. On lui conseilla sur les huit heures du soir de fuir à la faveur d’un déguisement : elle eût la fermeté de répondre que sa tête était prête mais qu’elle mourrait en la place, et n’abandonnerait jamais le roi et ses enfants. n assure que la reine devait faire donner le lundi 5 8.(octobre) un grand souper au Petit Trianon à tous les officiers de dragons, et du régiment de Flandre, qui sont à Versailles et des gardes du roi. Si cela est on ajoute que les troupes qui sont à Rambouillet devaient se réunir dans cette nuit au Petit Trianon et prêter à serment qu’elle exigeait. Si cela est, que les perfides conseillers sont coupables ! Et les injures qu’elle a reçu ont dues lui paraître aussi punition aussi juste mot rayé qu’elles étaient avérées. Il faut avouer que les gardes du roi ont payé chèrement leurs orgies. Combien la conduite de ceux-ci est opposée de la conduite de ce, qui dans le mois de juillet, lors que la sûreté et la liberté de l’Assemblée nationale étaient menacées, avaient résolus de se mettre entre les troupes étrangères envoyées contre l’assemblée, et de périr tous en défendant les représentants de la nation ! Leur étourderie leur a attiré des malheurs et le plus grand est le déshonneur qui rejaillit sur ce corps ; quels reproches n’auront pas à leur faire ceux qui sont en quartiers d’hiver, et qui s’étaient toujours montrés bons citoyens ! Un jeune garde du corps arrivait de sa province mardi matin ignorant tout ce qui s’était passé ; il fut arrêté en arrivant, et mis à mort. Le nombre des morts est incertain ; les uns le font monter à 30. Les autres à 25, et à dix-huit des deux côtés. On assure qu’il y a eu que six gardes du roi tué, et plusieurs blessés ; n’y aurait-il qu’un seul mort, c’est trop. On ne pense pas que les ennemis du bien public essaient de nouveau à exciter de la fermentation, jusqu’ici toute leurs trames ont tourné contre eux, remercions en la providence et espérons que désormais l’Assemblée nationale ne sera plus arrêtée dans ces travaux.
Le pain abonde actuellement à Paris et la plus grande tranquillité y règne.