Le calvaire

Tellement là que l’on ne s’interroge même plus sur son histoire, et pourtant !

A la Chapelle Achard un lieu incontournable de rencontre pour les jeunes et les moins jeunes : la place de l’église. Trois tilleuls et un enclos pour le calvaire, que l’on retrouve pratiquement sur toutes les cartes postales. Ce calvaire était tellement présent qu’il a fallu le hasard du temps pour que je m’approche du cartouche gravé sur le socle du monument.

C’est l’histoire de ce calvaire que nous allons vous raconter : il nous faut revenir en 1849, Louis Philippe Ier vient d’être renversé, la toute jeune république n’a plus que quelques temps à vivre avant l’avènement de Napoléon III et du second empire le 2 décembre 1852.

A la Chapelle Achard depuis le 4 avril 1847, la paroisse de la Chapelle Achard a été séparée en deux avec la naissance de la nouvelle paroisse de Saint Mathurin.

Paroisse de Saint Mathurin Paroisse de La Chapelle Achard

Notre calvaire est une des conséquences de cette séparation.

Le 6 mai 1849 le conseil municipal de la Chapelle Achard se réunit pour statuer sur l’état désastreux du mur du cimetière et les difficultés à financer ces travaux. Le 11 novembre de la même année, il vote le financement d’une maison d’école, la première école sur la commune.

Une séparation, un mur de cimetière effondré et une maison d’école. En quoi ces éléments interfèrent-ils dans l’histoire de notre calvaire ?

Depuis la construction de l’église au XIème siècle, cimetière et église sont liés et considérés comme un espace sacré. Un droit fondé sur le droit canon de l’église catholique qui précise en 1695, que la fabrique (conseil curial actuel) constitué par des laïcs répare la nef de l’église, clôture et entretient le cimetière et contribue au paiement des desservants.

Avec la révolution de 1789, ces espaces font partie des préoccupations des nouvelles municipalités communales, mais il faut attendre le décret impérial du 12 juin 1804 sur les sépultures pour entériner le nouveau code de fonctionnement des cimetières.

A la Chapelle Achard, suite aux réunions du 5 août et du 12 décembre 1849, une nouvelle réunion a lieu le 5 août 1850 . Depuis la séparation de la paroisse il y a maintenant deux cimetières, un à la Chapelle Achard et un à Saint Mathurin .

Il faut comprendre que sur la même commune de La Chapelle Achard, nous avons maintenant deux paroisses ; situation qui durera jusqu’ en 1873 avec la création d’une commune nouvelle : Saint Mathurin.

En 1849 le conseil municipal demande à la préfecture une réduction de deux sur les vingt ares de la superficie du cimetière de la Chapelle Achard devenu trop grand et on envisage de construire la maison d’école sur le terrain de ces deux ares inoccupés.

Le 29 décembre 1850 le conseil de la fabrique, après échanges de courriers avec l’Évêché, pose ses conditions à la municipalité pour donner son accord concernant la réduction du cimetière.(*Chronique paroissiale de la Chapelle Achard)

S’ouvre alors un conflit entre le droit et l’usage ; la loi de 1804 stipule que la commune devient propriétaire du foncier mais le monopole des sépultures est attribué à l’église. Il est précisé dans l’article 23 : que les sommes provenant de l’exercice ou de l’affermage de ces droits seront à l’entretien de l’église, des lieux d’inhumation et paiement des desservants, droits renforcés par un un autre article où il est écrit qu’il est expressément défendu à toute autre personne quelque soit sa fonction d’exercer le droit sus nommé.

Dans les conditions transmises par écrit par la fabrique au quatrièmement on peut lire :

« cet emplacement ne sera jamais employé qu’a un usage décent, on aurait, à ce qu’il paraît l’intention, d’y construire une maison d’école, notre désir serait qu’on y éleva un calvaire »

Tout cela sous le regard bienveillant de Monseigneur Baillès évêque de Luçon .

Un contexte tendu où l’on parle de désaliénation de la part de la commune d’une partie du cimetière dont le terrain lui appartient de par la loi .

Les cicatrices de la séparation des deux paroisses sont à peine refermées, évitons d’en ouvrir d’autres !!

En 1851, on doit refaire la route qui va de Jard au Port des Brochets(BOUIN), on en profite pour redessiner la route qui traverse le bourg de la Chapelle Achard. Ce nouveau tracé libère des terrains notamment celui de M Bonnin, terrain qui correspond parfaitement pour une maison d’école, tellement bien que le bâtiment existe toujours, c’est celui qui sert actuellement de bibliothèque à la Chapelle Achard.

1851 nouveau tracé de la route

Le vote du 7 mai 1852, suite à l’achat du terrain le 19 avril de la même année par le conseil municipal est déterminant pour la construction du bâtiment de l’école communale, tout en soulignant l’urgence car pour l’instant l’école se donne au cabaret. L’instituteur n’a aucun logement à la Chapelle Achard, il habite la Mothe Achard et est obligé par tout temps de faire la route à pied.

Au bout du compte tout le monde est satisfait, la mairie possède son terrain pour son école et la fabrique va pouvoir faire son calvaire, sauf que du souhait à la réalisation il va falloir passer par la case finances, et là, la fabrique ne répond plus !

Monsieur le Supérieur vient de m’écrire que votre Grandeur désire qu’on éleva un calvaire dans la partie à retrancher du cimetière.………….
Mais réellement la fabrique ne peut pas entreprendre de suite cette dépense…..

Pendant quinze ans le terrain reste inoccupé jusqu’au moment où l’abbé Guilbaud, le curé de la paroisse de la Chapelle Achard depuis 1848, décide de financer le calvaire sur ses propres deniers. Il honore ainsi une promesse faite à Monseigneur l’ Évêque en 1850.

Les plans sont attribués au Père Barillet, secrétaire particulier de Monseigneur et bien connu à la Chapelle Achard car c’est lui qui 12 ans auparavant a fait les plans de la chapelle de Gimonneau. Le devis s’élève à deux mille six cent quatre vingt quatre francs, les paroissiens quant à eux participent en offrant cinquante jours de travail et de charrois. Fin 1865, le calvaire est terminé et le cimetière est clos.

La bénédiction a lieu le 18 Novembre 1867 devant la population assemblée et 15 prêtres des paroisses avoisinantes, 80 jeunes filles en blanc avec bannières et oriflammes font cortège aux six statues portées par les hommes de la paroisse. Le missionnaire de Chavagnes, le Père David, accorde une indulgence perpétuelle de 40 jours à tous ceux qui réciteront un Pater et un Ave devant ce calvaire. De mémoire de chapelais ce fut une cérémonie grandiose. Source : chroniques paroissiales de la Chapelle Achard. Tout ira bien pour notre calvaire pendant 33 ans jusqu’en Février 1900. Un tempête mémorable jette à terre la grande croix de pierre, le Christ se brise sur les grilles d’entrée, seul reste debout le socle de la croix.

La Croix du calvaire n’est plus là, reste que le socle.

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Cela va durer neuf longues années avant que l’on ait les moyens de restaurer le calvaire et c’est le curé Bertet qui lance la restauration faisant appel à nouveau à la générosité des paroissiens.

Bientôt la croix est relevée, six nouvelles statues sont installées sur leur piédestal et le 9 Mai 1909 en présence du chanoine Boutin, nouvelle bénédiction du calvaire et nouvelle indulgence de 50 jours pour qui se signe devant celui ci.

Les années ont vu disparaître quelques grilles ,il ne reste plus que deux statues mais le calvaire est toujours debout.