Connue aussi comme la Chapelle de la Boule
La chapelle de Gimoneau ou de la Boule, pour tous ceux qui habitent la Chapelle Achard depuis moins d’un demi siècle, ne la cherchez pas vous ne trouverez rien. Pourtant son souvenir flotte toujours dans les esprits des anciens chapelais. Jeunes, nous allions jouer dans les bas de Gimoneau. Là, perdu dans la végétation un pan de mur, un tas de gravats, des poutres verdies par la mousse et tout d’un coup notre imagination galopait. On avait dix ans et l’on se demandait ce qu’était ces ruines ! Les légendes naissaient et même les adultes nous parlaient de pierre magique, d’accident de chasse d’un seigneur tombé de son cheval attaqué par des loups et sauvé par une apparition. Aujourd’hui nous avons ouvert les documents aux archives départementales à la Roche sur Yon et locales de la Chapelle et la Mothe Achard pour vous en raconter l’histoire.
Gimoneau c’est le nom du petit ruisseau qui coule à la sortie de la Chapelle et le village du Chaigne route de Grosbreuil. Si le cadastre de 1824 reste vierge de toute construction.
Celui de 1936 indique des ruines .
Nous trouvons mention de notre chapelle sur l’atlas cantonal de 1897
Que s’est il passé entre ces dates ? Faisons un bond de 180 ans en arrière.
Nous sommes en1844 sous Louis Philippe, roi des Français, à la Chapelle Achard notre curé s’appelle Louis Amiaud et est là depuis 1800.
Le 2 octobre 1844 il est informé qu’une donation serait attribuée à la paroisse de la Chapelle Achard par M. Antoine Hyppolite Du Parc. En effet M. Du Parc a couché sur son testament une donation pour faire ériger une chapelle sur les terres de sa métairie de la Boule dans le bas de Gimoneau.
Ma nièce ou ses héritiers seront en outre tenus de faire élever une chapelle sur la métairie de la Boule située sur la commune de la Chapelle Achard, département de la Vendée au lieu d’un taillis près d’un pont de bois que j’ai fait construire sur le chemin qui mène à ma métairie. Il sera employé pour cette construction une somme de cinq mille francs au moins.
Ma nièce et ses ayants cause serviront une rente perpétuelle de cent francs payables à la cure de la Chapelle Achard pour l’entretien de la dite chapelle et y faire dire une messe chaque année.
Niort le 12 Novembre 1844 Signé Hte. Du Parc.
Le 4 mai 1846 le curé Amiaud et le conseil de fabrique (conseil curial)accepte le legs et Il faudra attendre 1851 avant de percevoir ce don.
Mais durant ces 5 années beaucoup de choses ont changé à la Chapelle Achard. En 1847 le territoire de la paroisse primitive de la Chapelle Achard a été séparé en deux paroisses distinctes, paroisse de la Chapelle Achard et paroisse de Saint Mathurin. Déçu de la tournure prise par les événements et usé par l’âge à 80 ans passés, le curé Amiaud a démissionné en 1847 de toutes ses fonctions et a été remplacé par un jeune curé de 30 ans l’abbé Guilbaud.
Le curé Guilbaud écrit à l’évêché en faisant part de ses doutes sur l’utilité de l’érection de cette chapelle dans un lieu éloigné et souhaiterait plutôt utiliser l’argent du legs pour restaurer une chapelle dans l’église et l’église même, s’engageant avec la rente annuelle des 100 francs à entretenir la chapelle et y faire dire non pas une mais plusieurs messes par an, à Monseigneur l’Évêque d’en fixer le nombre.
Refus catégorique de l’évêque Monseigneur Baillés, il faut construire la chapelle de Gimoneau.
Les plans sont alors dressés par le recteur du petit séminaire de Chavagnes Pierre Barillaud. La réalisation des travaux est confié à M. Etienne Guillet maçon et Baptiste Durand menuiser tous deux de la Mothe Achard. A l’automne 1853 la chapelle est terminée, dévolue à la Vierge Marie.
La seule description que nous en ayons est tirée d’un article d’Émile Gauvrit dans la Dépèche Vendéenne : une Chapelle croulante.
Sur le territoire de la Chapelle Achard s’élève une chapelle mariale de respectables dimensions dont le frontispice grec détaché des murs…
En forme de croix latine, dévolue la Vierge Marie avec un statue de Notre Dame des Victoires.
L’autel de la chapelle est en fonte polychrome avec gradin et tabernacle, la statue placée dans une niche formant arcature entre les deux fenêtres latérales de même dimension et de même style.
Nous remercions Mme Bruno Léone, née dans les années 1920 pour son témoignage. Enfant elle passait devant la dite Chapelle pour se rendre à l’école. Identifiée comme la plus ressemblante parmi beaucoup de photos de chapelles. La description donnée dans l’article précédemment cité nous donne une idée de se que pouvait être la chapelle voulue par M. du Parc.
La bénédiction a lieu le 6 novembre 1853 par le curé Guilbaud assisté de l’abbé Goineau curé de Girouard et l’ensemble des habitants. Tous les 8 septembre il y a une célébration avec procession à la chapelle de Gimonneau et parfois aux Rogations.
Durant une dizaine d’années tout se passe bien, mais en 1866 la nièce Madame Gorgus décède, et c’est alors au petit neveu d’assumer la charge de la rente annuelle perpétuelle de100 francs. Sauf que ce dernier se refuse de payer la dite rente dès 1867 ! Car depuis le concordat de 1801 « toutes les chapelles domestiques, les oratoires particuliers ne pourront être établis sans permission expresse du Gouvernement, accordée à la demande l’Évêque » et à l’époque en 1852, sur instruction de Monseigneur Baillés, on était passé outre cette formalité pourtant indispensable pour rester dans le droit, donc juridiquement cette chapelle n’avait pas d’existence légale. C’est aussi pourquoi à l’époque elle n’apparaît sur aucun cadastre et qu’ on l’ajoutera au crayon en 1936 comme une ruine.
Le curé Guilbaud se refusant de faire assumer cette charge à la Fabrique de la paroisse, se décide en 1870 à rencontrer à Niort le petit neveu M. Gorgus, qui lui reste campé sur sa position et refuse encore tout paiement à la paroisse.
Le curé Guilbaud se trouve dans l’obligation de monter un dossier de régularisation auprès du ministère des Cultes qui, dans un premier temps refuse, mais suite aux pressions de l’Evêque Monseigneur Colet finit par régulariser la situation.
Alors que devient la rente perpétuelle de 100 francs ?
Devant ce dossier boiteux M. Gorgus, notaire de profession, tergiverse arguant d’un revers de fortune, argument fallacieux que dément l’enquête du sous préfet des Sables. Il propose donc d’abandonner la propriété de la chapelle de Gimoneau à la paroisse contre l’annulation de la rente dite perpétuelle. La paroisse accepte cette solution de mauvais gré car, si elle jouit de la totale propriété, elle perd le moyen d’en assumer l’entretien. Entretien coûteux car la chapelle est placée sur un promontoire et sa couverture d’ardoises résiste mal aux vents mauvais, entraînant fuites et infiltrations. Quelques travaux jusqu’en 1888, puis peu à peu le bâtiment tombe en désuétude.
A la sortie de la guerre en 1918 elle est interdite au public. Tous les anciens parleront de sa lente dégradation, et en 1970 ne subsistait qu’un pan de mur. L’endroit vallonné et isolé devint propice au dépôt d’ordures, vieilles machines à laver et vieilles voitures. Lassé de ces pratiques un jour le propriétaire du terrain Paul Retail, comblera le dépotoir, abattra le vieux mur devenu dangereux, et bientôt on ne verra plus rien de la Chapelle de Gimonneau.
Ainsi se termine l’histoire de la chapelle de Gimoneau, il reste toujours un mystère. Pourquoi, M. Antoine Hyppolite Théophile Du Parc Parc a–t’ il voulu cette chapelle en ce lieu isolé ? Les textes et documents restent muet sur ses motivations. Un parfum de secret, d’inabouti conclu notre histoire.